Un entrainement bien conçu peut être plus efficace que le football de rue

Professeure à l’Institut National d’Éducation Physique de Catalogne (INEFC) et entraineure nationale de Gymnastique Rythmique (RFEG), Carlota Torrents est l’une des références dans les domaines de la compréhension et de l’interprétation du sport comme un phénomène complexe.

Auteure, avec Natalia Balagué, de l’excellent Complejidad y Deporte (La complexité et le sport), elle est aussi à l’origine ou co-auteure de nombreux papiers sur les thèmes de la créativité, les systèmes dynamiques et l’entrainement, l’expression corporelle ou encore la manipulation des contraintes comme moyen, favorisant l’émergence de réponses fonctionnelles.

Nous avons profité de cet entretien pour essayer de « définir » le rôle et la place de la créativité dans le football.

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La créativité semble être un sujet à la mode, notamment dans le sport et surtout le football, comment définiriez-vous ce terme ?

Bien que la créativité soit souvent décrite d’un point de vue cognitiviste, la littérature scientifique définit la créativité comme une compétence dans la réflexion et non une compétence cognitive, c’est à dire une capacité à penser de manière originale tout en étant également fonctionnelle. Il n’est donc pas utile de proposer des réponses originales, si elles n’ont pas de fonction. En résumé, si la créativité n’est pas fonctionnelle, elle ne sert à rien.

Cette définition est aussi valable pour des activités « intellectuelles », mais dans le sport, ce dont nous avons besoin, c’est de pouvoir donner des réponses variées, originales, surprenantes. Il ne s’agit donc pas, seulement, d’une capacité de réflexion, c’est aussi une capacité motrice.

« La littérature scientifique définit la créativité comme une compétence dans la réflexion et non une compétence cognitive, c’est à dire une capacité à penser de manière originale tout en étant également fonctionnelle »

Il faudrait donc une définition qui tienne compte de la personne dans son ensemble et de sa relation avec l’environnement, car dans un sport d’opposition, vous êtes constamment en relation avec d’autres personnes et vous devez répondre à cela de manière improvisée, et à l’instant T, ce qui constitue une grande différence.  

Dans le sport et notamment le football, l’idée est de réduire cette part d’improvisation, voire d’incertitude. En ce sens la créativité peut-elle venir télescoper ce principe de contrôle ?

Bien sûr, l’entraineur aimerait que tout se passe comme il l’a prévu, mais en réalité, quel pourcentage de ce qui arrive dans le jeu a été prévu au préalable ?

Un pourcentage très faible, non ?

Cette question a été étudiée et même si cela n’a pas été publié, les études montrent très clairement que sur l’ensemble des choses que l’entraîneur a dans la tête, un pourcentage infime se produira, étant donné que l’équipe adverse, fera en sorte que ce qui a été  prévu, ne se produise pas.

Bien sûr, si vous jouez contre une équipe d’un niveau inférieur à la vôtre, il est possible que ce que vous aviez prévu, se produise, plus facilement et dans des proportions plus importantes. Mais généralement ce n’est pas le cas. Les championnats étant plus ou moins homogènes, en termes de niveau, il y a peu de chance que ce qui a été prévu, se réalise.

« Il faut former ses joueurs pour répondre à cette incertitude »

Au fil du temps et avec l’expérience, vous pouvez évidemment sentir un peu les choses, mais pas la manière précise dont les joueurs réagiront. Il faut donc, former ses joueurs pour répondre à cette incertitude. Si tous les entrainements sont conçus de manière à ce que les joueurs répondent toujours de la même façon à une situation donnée, lorsqu’ils seront confrontés à une situation « nouvelle », comment feront-ils ?

Est-il nécessaire de « cultiver » la créativité dans un sport collectif comme le football, qui est basé sur l’improvisation, comme tout sport collectif d’ailleurs ? Oui et non. C’est un sport collectif comme la natation synchronisée ou la gymnastique rythmique par équipe, mais il y aura toujours bien plus d’improvisation dans un sport d’opposition comme le football!

Quand vous évoquez les sports d’opposition, vous faites référence aux activités d’espace partagé comme l’a formalisé Francisco Seirul·lo ?

Le sport d’opposition est un sport l’improvisation, qu’il s’agisse d’espace partagé ou non. Au volley-ball il y a une part d’improvisation, même si elle n’est pas aussi importante que dans le football. Au badminton et au tennis, il y a aussi de l’improvisation, comme dans toutes les activités où il y a de l’opposition.

« Pour définir la créativité, je prends en compte l’interaction de la personne « créative » avec l’environnement dans lequel elle interagit »

Au regard de votre définition, vous semblez insister sur  le rapport à l’environnement et l’idée de processus plus que de produit. Peut-on percevoir ici une approche écologique, systémique de cette notion de créativité ?

Oui, bien sûr. Pour définir la créativité, je prends en compte l’interaction de la personne « créative » avec l’environnement dans lequel elle interagit, mais pour avoir une meilleure compréhension de ce qu’est ici l’environnement.

En football, l’environnement est en partie composé de l’équipe adverse et des partenaires qui interagissent avec vous, en vous donnant des réponses. Le joueur va donc s’adapter, en proposant aussi des réponses, qui vont entrainer une cascade de décisions.

Il n’y a donc pas de décision, au sens MA décision. La décision prise à un instant, dépend de celle prise auparavant et dépend de celle de l’équipe adverse, donc ce n’est pas seulement le joueur qui décide, en fonction de lui et de ses éventuelles possibilités.

Le sport d’opposition est, en ce sens, très différent de l’écriture d’un poème, par exemple. La poésie est une activité où vous avez le temps d’apprécier tranquillement les rimes, pour ensuite décider laquelle est la meilleure, gommer et recommencer. Quand, il s’agit de répondre dans le jeu, vous n’avez pas ce temps et la prise de décision doit être très, très rapide, pratiquement instantanée, sans respecter les phases du processus de création, puisque dans les sports d’équipe, il n’y a pas de temps pour ces phases.

En football, le produit c’est votre corps en mouvement. Vous en faites partie et on ne peut donc pas séparer les choses, car en même temps, vous faites aussi partie du processus, ce qui est assez complexe….

Vous dites que la créativité se matérialise de manière quasi instantanée, finalement sans en être conscient, peut-on revenir sur cet aspect ?

Il y a un lien avec la conscience, parce que le joueur peut avoir une intention de départ qui influencera ses décisions. L’entraineur peut aussi avoir des intentions qui influenceront le joueur, tout au long du match. Mais en réalité, les intentions diverses (joueurs, entraineurs, adversaires) seront énormément conditionnées par les événements du jeu. Ainsi, l’intention interagit avec les actions à réaliser, à chaque instant. C’est pourquoi, il est possible que l’intention initiale soit bien présente, mais qu’au final, vous ne la suiviez pas.

 Je suis aussi consciente, qu’il est très difficile de savoir ce qui se passe dans le cerveau quand on joue au football. Néanmoins il y a des études, non issues des sports, qui montrent qu’en musique par exemple, lorsque les musiciens improvisent, les régions du cerveau qui sont activées sont davantage celles qui sont reliées aux activités inconscientes.

Donc, quand vous êtes dans cet état de « flow », que vous êtes vraiment bien dans l’instant présent, que vous vous sentez vraiment à l’aise avec ce que vous faites, ce sont ces zones du cerveau qui sont davantage activées. Évidemment, cela heurte un peu l’idée que l’on prétend toujours faire ce que l’on a décidé de faire dans chaque situation, parce que le « flow » ne fonctionne pas ainsi.  

Si vous étudiez le fonctionnement du cerveau, bien que nous en sachions finalement assez peu, certaines études montrent très clairement que les régions du cerveau qui sont activées chez les sportifs en mouvement, sont presque les mêmes que chez les musiciens, alors qu’eux ne bougent pas.

Et en plus, il n’y a personne pour vous voler votre instrument…

Oui, oui c’est très vrai.

La créativité est donc en étroite relation avec l’environnement, bien que le terme de milieu semble plus approprié, puisqu’en français le mot environnement laisse à penser que le sujet se trouve un peu à l’extérieur alors que le milieu sous-entend « l’immersion ». Traditionnellement, la créativité est envisagée comme quelque chose d’inné.  On viendrait au monde en étant un créatif ou pas. Or, pendant la période de confinement, on a pu observer que, sans l’impact quotidien de l’école les enfants semblent être (re)devenus créatifs. Peut-on faire un lien entre cette absence d’école et ce regain de créativité ? 

Eh bien, je ne suis pas tout à fait d’accord ! Sur les réseaux sociaux, par exemple, il y a beaucoup de gens super créatifs, qui publient des choses où vous dites « wow ». Mais c’est aussi le cas, le soir, lorsque vous lisez une histoire à vos enfants. Vous devez être créatif dans mille situations de votre vie.

En revanche, ce que nous ne faisons pas forcément, c’est nous exprimer de manière créative. En tant qu’adulte, nous n’utilisons plus la dimension artistique de la créativité, telle qu’on pourrait l’envisager dans le jeu, que nous avons en général abandonné. Cependant, il y a des milliers de situations du quotidien dans lesquelles nous sommes créatifs et même plus créatifs que nos propres enfants.

Je crois que nous sommes tous créatifs, mais que nous sommes un peu prisonnier, au moment d’exprimer librement notre créativité, puisque nous n’en n’avons plus les moyens comme à l’école, à travers la danse, le chant, l’écriture, la peinture. Tout cela nous a été enlevé, n’est-ce pas ?

L’éducation et l’école, la volonté et d’une certaine manière la « pression » de faire les choses correctement, freinent notre créativité, parce que si vous n’êtes pas performant dans ce que vous faites, vous laissez tomber.

« On ne peut pas concevoir la créativité sans les nombreuses et coûteuses tentatives préalables »

Je dis cela parce que, je ressens aussi cette pression. Alors, face à cette situation, que dois-je faire? Quelles sont les activités que je préfère ? Eh bien, j’aime les activités où je réussis et celles où je réussis mieux que les autres. Par exemple, je dessine très mal, mais peut-être que je pourrais très bien laisser libre cours à mon imagination et me sentir mieux en dessinant, même si mes dessins sont horribles. Il ne faut pas les mettre de côté, au contraire, il faut s’y remettre pour s’améliorer.

C’est difficile, mais on ne peut pas concevoir la créativité sans les nombreuses et coûteuses tentatives préalables. Je crois que ces tentatives, sont surtout liées à la nécessité de faire quelque chose de différent, pour ne pas faire ce que les autres font. C’est ce besoin, qui nous pousse à chercher d’autres choses qui nous plaisent, non ?

Les enfants le font en permanence. Par exemple, si vous les laissez longtemps devant un écran, ils s’adapteront  et s’amuseront. Mais si vous leur enlevez la tablette, ils chercheront à faire autre chose et ils développeront davantage leur créativité.

Pour revenir, au sujet et le lien avec l’école, je crois que cela dépend beaucoup des écoles même si dans la plupart, continue à prédominer le modèle de la volonté de tout bien faire, avec le même rythme pour tout le monde et peu d’individualisation de l’éducation. Au final, l’école convient bien à ceux qui réussissent en lecture, en écriture et en mathématiques. En revanche les enfants qui ne réussissent pas dans ces disciplines, l’école ne leur convient pas, en tous les cas c’est comme ça en Espagne.

En France il y a aussi une culture très élitiste de l’école et un mode d’enseignement très vertical bien que les choses progressent énormément. L’école semble éteindre la créativité des adultes de demain, d’autant que traditionnellement la créativité semble être plus liée aux activités artistiques ou la gymnastique. Mais peut-on considérer qu’il y a une part prépondérante de créativité dans les sports collectifs comme le football, car au final la partie artistique du football ne rapporte rien au tableau d’affichage ?

La créativité, lorsqu’elle est associée à la dimension « artistique » (comme dans le patinage), n’est pas quelque chose de créatif, puisqu’elle est davantage en lien avec l’art.

« Dans un sport d’opposition, il faut sans cesse clarifier l’incertitude »

Dans les sports d’opposition, il y a évidemment une réelle place pour la créativité. Il est vrai que la créativité est aussi nécessaire dans les sports artistiques puisqu’il faut très souvent créer une chorégraphie, par exmple. Pour faire un dessin, il faut d’abord le créer et pour cela il faut être un peu créatif. Même si à certains moments, il faut s’adapter et le changer, en général, il faut être moins créatif si l’on peut dire, « dans l’art » que dans un sport d’opposition où il faut sans cesse clarifier l’incertitude. Une incertitude à laquelle il faudra répondre. Si le joueur y répond de manière créative, c’est mieux, car il faudra l’être pour surprendre l’adversaire. Donc la créativité fait partie intégrante de la performance.

Comme nous le disions précédemment, il y a un certain degré d’improvisation dans le football et nous avons le sentiment que la créativité peut être préjudiciable à la performance, surtout au plus haut niveau ou pire dans le football de jeunes.

C’est possible. Pourtant la créativité se prête vraiment au football, notamment pour éliminer son adversaire, pour obtenir la supériorité numérique, pour marquer un but… En résumé, pour surprendre l’équipe adverse et faire des choses auxquelles elle n’est pas préparée. Vous ne pouvez donc pas dissocier la créativité de la performance. Selon vous, pourquoi la créativité est considérée comme préjudiciable à la performance ?

Elle est considérée ainsi parce qu’elle est associée à la désorganisation, alors que dans le même temps le rôle de l’entraîneur est d’organiser les choses, de mettre en place une organisation du jeu, de placer les joueurs de façon rationnelle sur le terrain etc. La créativité  semble faire peur, parce qu’elle vous oblige à sortir de votre zone de confort, car elle est difficilement mesurable, maitrisable, contrôlable.

Exactement, et il y a énormément de pression, surtout dans les sports les plus médiatisés, car cette pression transforme la vision que l’on a de l’entraineur.

Je crois que l’entraineur n’est pas toujours celui qu’il semble être, mais qu’il a besoin de projeter cette image de celui qui organise tout, contrôle tout, maitrise tout. Je veux dire par là que les médias, notamment, ne comprendraient pas, qu’en réalité, la solution ne soit pas celle qui est partagée  avec eux. Évidemment qu’un entraîneur doit avoir les idées claires sur ce qu’il veut et sur ce qu’il veut voir sur le terrain, mais ça n’en fait pas pour autant un entraineur qui sait tout ce qui va se passer.

Mais cette posture n’est pas bonne pour les médias, pour les journalistes. Comment leur expliquer que tu ne sais pas?

La solution, c’est beaucoup de pédagogie, mais pas envers les médias parce que c’est un travail de très longue haleine…

Alors, il faut faire semblant d’une chose et en faire une autre. Je pense que, surtout au très haut niveau, ils sont obligés de montrer à la presse, des choses qui sont très différentes de ce qu’ils font réellement. Ils proposent des images qui font toujours plaisir aux médias: des joueurs à l’échauffement, à l’entraînement, etc. Mais tout cela est fait pour la presse.

Souvent, cela n’a rien à voir avec ce qui se passe ensuite sur le terrain, car aujourd’hui encore, cela heurte un peu les mentalités, tout comme les écoles libres que l’on paie cher pour que les enfants ne reçoivent aucune consigne !

Ce genre de croyance signifie que, pour être un bon entraîneur, il faut dire tout ce qu’il faut faire, mais ce sont juste des croyances, surtout dans un sport médiatique où les entraineurs ont un métier très exposé et notamment sur les consignes données aux joueurs. Mais au final ils n’ont pas forcément besoin de le faire.

La limite entre la liberté des joueurs, leur créativité dans un certain cadre et la désorganisation peut apparaître parfois comme très mince, mais la créativité collective s’entraine-t-elle ?

Oui, bien sûr, si votre approche est de tout dicter aux joueurs, cela va forcément heurter le comportement créatif, parce que les joueurs peuvent parfois évoluer d’une manière très différente de votre façon de fonctionner, car vous n’êtes pas à leur place. Pour favoriser la créativité, il faut d’abord accepter qu’il n’existe pas de boule de cristal ou de formule magique, car vous ne pouvez pas savoir comment chaque joueur peut réagir.

« Pour développer la créativité, il faut d’abord que l’entraîneur et le joueur partagent la même perspective et qu’ils tolèrent la diversité des réponses »

Il faut accepter de ne pas être un magicien, mais une personne qui accompagne les joueurs. Être un concepteur d’opportunités de progression et dont les séances seront autant d’opportunités de progression offertes aux joueurs.

Oui, c’est évident. Mais au final, c’est un peu un piège parce que celui qui a le pouvoir de décision, c’est l’entraîneur et c’est lui qui va choisir qui jouera ou non. Et cette perspective, peut-être un obstacle à la créativité des joueurs parce qu’ils peuvent se sentir jugés en permanence.

Bien sûr, c’est pourquoi pour développer la créativité, il faut d’abord que l’entraîneur et le joueur partagent la même perspective et qu’ils tolèrent la diversité des réponses. Sans cette autorisation préalable, c’est impossible. Mais comme nous le disions auparavant, le climat idéal pour favoriser la créativité est difficile à installer parce que, la personne qui guide le processus d’apprentissage doit faire preuve de confiance et doit accepter cette diversité dans les réponses données par les joueurs.

« Je crois que l’entrainement peut être plus riche que le foot de rue dans le développement de la créativité, s’il nous permet d’avoir plus facilement de la variabilité dans les réponses, surtout si l’entrainement est dirigé par quelqu’un qui observe sans forcément intervenir »

Si en tant qu’éducateur, vous voulez constamment imposer les réponses que les joueurs doivent donner, alors le processus de créativité est tué dans l’œuf. Cette confiance, c’est l’ouverture indispensable, elle est nécessaire pour que la créativité se développe, toujours et encore, mais elle peut également être favorisée avec l’aide d’une personne qui la limite, même si c’est plus difficile, c’est intéressant. Une chose est certaine, pour susciter la créativité des joueurs, l’entraineur doit offrir cette ouverture d’esprit.

Au final, pourrait-on dire que pour faire preuve de créativité sur le terrain mais aussi en dehors et notamment dans les relations humaines, le rôle de l’entraîneur est d’offrir aux joueurs de « l’amour » ?

Oui, aussi. En plus du respect. L’entraineur doit guider, il doit montrer le chemin même s’il est nécessaire de sortir des sentiers battus pour voir jusqu’où ce jeu peut aller. Évidemment que l’entraineur doit indiquer aux joueurs une direction, mais dans cette direction il doit y avoir plusieurs réponses possibles. Je crois que l’entrainement peut être plus riche que le foot de rue, le jeu complètement libre, dans le développement de la créativité, s’il nous permet d’avoir plus facilement de la variabilité dans les réponses, surtout si l’entrainement est dirigé par quelqu’un qui observe sans forcément intervenir.

En revanche, si lors de l’entrainement les réponses des joueurs sont toujours les mêmes, qu’elles sont « stables », alors là l’entraineur doit intervenir pour créer de la variabilité, pour que les joueurs explorent. En ce sens, l’entraineur a une fonction vitale quand il observe.

Lorsqu’il y a une stagnation, que faisons-nous des joueurs pour qu’ils continuent à grandir ? C’est pour cela que l’observation est fondamentale, car notre œil est le témoin et je pense que cette fonction est indispensable pour un entraineur, comme je crois aussi qu’une séance d’entrainement bien conçue peut être beaucoup plus efficace que de jouer dans la rue en total liberté, sans personne qui observe attentivement.

En tous les cas, l’entrainement dans ces conditions d’observation, devrait être plus efficace que le jeu dans la rue. Si ce n’est pas le cas, c’est un signe que la méthode d’entrainement n’est pas bien maîtrisée.

C’est-à-dire qu’il y aurait un paradoxe au sujet des tâches ouvertes (tâches sans contrainte), ce type de tâche qui limiterait donc la créativité des joueurs ?

Non, il n’y a pas de formule magique, et je ne pense pas qu’il faut toujours proposer des tâches ouvertes ou des tâches fermées. Ce n’est pas un but en soi. Maintenant, quand vous observez une tâche ouverte, que se passe-t-il ? Nous avons souvent recours aux réponses habituelles, il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, mais il est très probable que cela se produise comme ça, que les joueurs répondent un peu toujours de la même manière.

C’est pour cela que l’entraineur est là, pour observer pour modifier quelque chose, pour que les joueurs sortent de leurs habitudes et qu’ils explorent d’autres solutions et élargissent leur palette.

On a souvent la tentation de proposer un jeu libre, ou une séance libre pour offrir de la liberté aux joueurs et favoriser leur créativité. Mais sans contrainte, ne limitons nous pas les comportements exploratoires ?

Si votre équipe est dans un jour « sans », ou que vous sentez qu’elle est un peu moins bien sur le plan émotionnel, peut-être que ce type de situations conviendra. De toute façon, il y a toujours des contraintes, puisque chaque joueur est soumis aux règles du jeu et que celles-ci sont clairement contraignantes.

Alors oui, cela ne va pas aider nos yeux à mieux observer, mais sur le moment cela peut aider. Je pense que ce type de situation, en proposant des contraintes pertinentes, est plus favorable au travail exploratoire. Plus nous varions les conditions, plus nous modifions les contraintes, plus les réponses risquent d’être variées, plus cela fera émerger de la variété dans le jeu.

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