France - Australie 2022 : analyse pré-match

Analyse proposée par Adrien Tarascon, responsable du développement des joueurs, de la méthodologie et des données au LOSC.

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Pour leur premier match, les Bleus ne devront pas sous-estimer cette équipe australienne. Si les Socceroos ne peuvent s’appuyer sur beaucoup d’individualités (certainement un des effectifs les plus faibles du tournoi qualitativement), c’est aussi l’une des équipes les mieux organisées.

Leur 442 est compact, capable de rapidement « voyager ensemble » pour éviter des situations de 1v1 défensifs à leur latéraux notamment. Leur efficacité sur CPA (0,57xG / match) en phase de qualification pour le mondial, les positionne comme l’une des équipes  les plus dangereuse au monde dans ce registre.

Clé n°1 : fissurer le bloc compact australien

La dernière ligne défensive australienne craint la profondeur. Lors des matchs de qualification pour cette Coupe du Monde 2022, ils ont régulièrement reculé face à des attaquants bien moins rapides que Mbappé.

Dès les premières minutes du match, les courses dans le dos de cette dernière ligne australienne seront importantes. Ce sera un élément clé, si les Bleus veulent assez vite se créer des espaces pour pouvoir combiner à l’intérieur du bloc australien.

L’autre objectif dans le jeu long sera d’amener du chaos organisé, afin de semer le doute et de distendre les lignes adverses, même si cela laissera plus d’espaces en transition aux australiens. Cela permettra aux Bleus d’exploiter leurs supériorités individuelles, partout sur le terrain.

Néanmoins, ils devront rester vigilants, car les Socceroos ont déjà montré qu’ils étaient capables de maintenir un haut niveau d’intensité défensive, parfois sur plus de 70 minutes. 

Clé n°2 : une structure adéquate pour éliminer la 1ère ligne de pression

En 2018, le jeu de position des bleus avait été souvent défaillant contre l’Australie, notamment dans l’entame de match.

Les Bleus avaient éprouvé certaines difficultés à s’organiser efficacement pour éliminer la 1ère ligne de pression australienne

FR vs AUS 2018 : 7 joueurs français pour surpasser la 1ère ligne de pression du 442 australien (via footbalia)

Lors des matchs de qualification pour ce Mondial, le Japon a proposé des choses intéressantes face aux australiens, en s’organisant en 2+3 pour éliminer le 1er rideau australien et mettre en difficulté leur 442 compact.

AUS vs JAP 2022 : 2+3 des japonais pour surpasser le 1er rideau australien

Sur les images ci-dessus, on peut observer que le placement du relayeur gauche japonais (Tanaka #17) met le doute à l’ailier australien (Boyle #6), qui préfère rester à hauteur de ses milieux de terrain. Quand il sort, c’est à contretemps. Si Rabiot ou Tchouaméni viennent dans ces zones, ils y trouveront du temps pour lancer Mbappé dans la profondeur, ou simplement toucher L.Hernandez dans le dos des milieux adverses.

Aussi visible à 41’05’’ la relation 8 → 6, qui est un circuit classique du 2+3. Rabiot pourra-t-il servir Tchouaméni libre dans le dos des 2 attaquants ? Les australiens pressent généralement en 442 Pivot. C’est-à-dire que contre un 4+1, ils doivent gérer les 2 centraux + le milieu défensif adverse en 2v3 avec toujours une présence sur le 6.

C’est parfois efficace mais c’est surtout le pressing le plus énergivore (individuellement), parmi les organisations actuellement utilisées. Si la relance des Bleus respecte quelques principes simples : défenseurs centraux larges, latéraux bas, décrochage du 6 lorsque nécessaire pour un 3v2 initial, ils devraient rapidement fatiguer les australiens et trouver des lignes de passe dans le dos de leurs attaquants à l’image à 41’05’’

Compte tenu des joueurs pressentis, il est peu probable que la France se structure en 2+3 en phase de création. Un 3+2 avec Pavard pour former la base à 3 en compagnie de Konaté et Upamecano serait plus naturel. Il laisserait Dembélé menacer le couloir droit.

L.Hernandez ne sera pas le plus à l’aise pour être touché dans le dos de la ligne de milieu australienne, mais il est suffisamment habile techniquement pour nous permettre de fixer le jeu à gauche en attendant le bon moment pour renverser vers Dembélé, en situation de 1v1.

Clé n°3 : fixer pour renverser

Face au bloc compact des australiens, les milieux devront proposer des relais à l’intérieur  au porteur, afin de pouvoir renverser le plus rapidement possible le jeu et trouver des  situations de 1c1, voir de 2c1 à l’opposé. Les joueurs d’interligne devront proposer des courses dans la profondeur, afin de fixer les latéraux australiens.

Par exemple, l’utilisation du jeu long de Tchouaméni, pour renverser vers Dembélé, isolé à l’opposé, serait une option intéressante. Contre le 442 de Leipzig c’est une arme que le madrilène avait déjà déployé.

RBL vs RMA 2022 : renversement de Tchouaméni, trouvé en relai à l’intérieur

Clé n°4 : presser pour orienter la relance australienne vers leur côté droit

S’il est certain que l’Australie, sortira long sur 6m, on peut se demander s’ils prendront souvent l’initiative de construire depuis leur moitié de terrain, laissant les Bleus les presser.

Si cela devait se produire les joueurs français  doivent être prêts. Il y aura un certain nombre de récupérations hautes et de situations de « chaos organisé », propices aux qualités individuelles des Bleus, à aller chercher sur ce moment du match.

Rowles (#17), DC gaucher a montré contre le Pérou sa capacité à jouer sous pression. Leur latéral gauche,  Behich (#16), est à l’aise pour recevoir dans le dos de l’excentré adverse.

Sur le pressing, lorsque l’Australie ne choisira pas de jouer immédiatement long, il sera important d’orienter le jeu vers leurs DC Droit / Lat Droit, plus en difficulté techniquement sous pression.

AUS vs PER 2022 : Rowles sort de la pression par une très belle passe vers Behich, qui créé le décalage initial

Clé n°5 : gestion du 2+3 ou du « carré intérieur » australien

Nous parlions en introduction d’une équipe collectivement huilée, ce n’est pas seulement le cas sans ballon. Malgré le 0-0, l’Australie est allée chercher son billet pour le mondial face au Pérou avec de belles séquences de jeu.

En cas de 442 tricolore, la déformation en 2+3 des australiens sera le seul point de vigilance. Irvine (#22) dézone à gauche pour laisser Behich (#16) se projeter.

En cas de milieu à 3 décidé par Didier Deschamps, il faudra être vigilant au « carré intérieur » australien, l’ailier gauche libérant le couloir à Behich (#16) pour occuper l’interligne. Le Pérou pressant en 4141, a souffert face à cette réponse tactique australienne.

Clé n°6 : 2nds ballons et fautes dans nos 40m

Au-delà des 6m australiens, une bonne partie du match pourrait se passer dans les airs. Le jeu direct étant l’une des armes principales des Socceroos, associé à un impact important sur les 2nde ballons.

Pour les Bleus, l’équation est double : sécuriser les 2nd ballons et remporter les duels, en commettant le moins de faute possible. Les coups de pied arrêtés étant l’autre arme majeure de l’Australie sur ce match.

Malgré la possibilité de jouer court, jeu long sur le 9 australien, 2 joueurs au 2nd ballon, le duel gagné par Hrustic (10#) lui permettra de se créer la première situation du match

Clé n°7 : Verticalité à la récupération

La lumière est venue de là en 2018, une transition en 2 passes verticales jusqu’au pénalty provoqué par Kylian Mbappé.

Il n’y en aura pas beaucoup, mais il faudra exploiter les possessions australiennes pour attaquer un bloc étiré en transition. La qualité de verticalité à la récupération d’Aurélien Tchouaméni.

Example de transition offensive menée par le Pérou lors de leur rencontre face à l’Australie en match de qualification

Conclusion

Le choc du forfait de Benzema ne se digérera pas en 72 heures, mais l’Australie est le bon adversaire pour se lancer dans la compétition et passer à autre chose. Ce match sera encore plus riche en enseignements après le forfait du « nueve ».

Si nous pouvons sans doute battre les Socceroos sur quelques exploits individuels, il est désormais entendu que la France aura besoin d’une animation collective riche pour aller loin au Qatar. L’Australie est un premier examen abordable mais cette fois-ci indispensable pour des Bleus qui se cherchent.

Une impasse généreusement récompensée comme à Kazan en 2018 ne nous emmènerait pas aussi loin. Leur 442 compact, exige tempo, fixation puis renversement, pour chercher la largeur à l’opposé. Des questions simples pour nos Bleus qui individuellement et collectivement devront nous apporter quelques réponses.

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